La réforme accélère la transformation des organismes de formation (16ème UHFP)
La loi du 5 septembre 2018 libère l’action de formation en élargissant sa définition. Elle assouplit le cadre de l’ancien plan de formation et ouvre ainsi la voie à l’entreprise apprenante. Les plus grandes d’entre elles n’ayant plus accès aux fonds mutualisés en dehors de l’alternance adopteront vis-à-vis de leurs prestataires une approche tournée vers le retour sur investissement. Elles auront une exigence renforcée d’innovation et d’évaluation.
Optimisation des compétences
Pour capter ce marché devenu très concurrentiel, les organismes de formation doivent repenser leur offre de services, leurs pratiques et leur modèle économique. À Biarritz, le sujet a été discuté lors d’une table ronde organisée par le Club Entreprise de la 16ème Université d’hiver de la formation professionnelle, le 1er février dernier. Cédric Puydebois, sous-directeur des politiques de formation et du contrôle au sein de la DGEFP [Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle], a rappelé l’esprit porté par la réforme. « La loi pose les jalons d’un cadre plus favorable à l’optimisation des compétences du personnel des entreprises. La définition de l’action de formation a été volontairement minimaliste et souple, laissant ainsi toute la place à la créativité. Elle y est décrite comme un processus pédagogique en vue d’atteindre un objectif professionnel et privilégie ainsi la notion de parcours. Parmi les nouvelles dispositions, les actions de formation en situation de travail ont été encadrées et inscrites dans les textes . »
Des prestations de conseil
Les entreprises se disent prêtes à développer à grande échelle les modalités d’acquisition de compétences internes liées au mentorat, au tutorat, aux nouvelles expériences professionnelles par projet ou encore à la digitalisation. Toutefois, cette liberté soulève d’autres enjeux. « Depuis de nombreuses années, les responsables formation des entreprises demandent à ce que l’on puisse matérialiser l’ensemble des actions qui contribuent à la formation de leurs salariés en dehors des stages classiques en présentiel. Il s’agit donc d’une grande opportunité mais aussi d’une grande difficulté car nous devons rendre des comptes à nos administrateurs, aux managers opérationnels et aux partenaires sociaux. Il nous faut des outils pour construire, suivre et comptabiliser ces parcours », déclare Philippe Pieters, directeur de l’Université groupe RATP. Face à ces organisations « apprenantes », les organismes de formation ont donc une carte à jouer. « Il nous faut interroger notre proposition de valeur pour nos clients. Ces derniers nous attendent sur l’ingénierie d’innovation et de professionnalisation ou encore sur le déploiement rapide d’une stratégie de développement des compétences alors que les changements dans les métiers et les méthodes de travail s’accélèrent », indique Guillaume Huot, membre du directoire du groupe Cegos. Même orientation vers le conseil et l’appui à la mise en œuvre chez IGS. « Nous disposons aujourd’hui d’une forte expertise en matière d’ingénierie de l’alternance. Nous allons accompagner nos clients dans la construction de parcours par blocs de compétences dans lesquels le CPF pourrait s’inscrire et dans la recherche d’opportunité de créer un CFA ou de rejoindre un écosystème déjà existant », confirme Gilles Pouligny, son directeur général adjoint.
Des indicateurs d’évaluation
Le besoin renforcé d’évaluation des actions de formation représente un autre axe de positionnement pour les organismes de formation. « Nous passons d’une culture du chiffre à une culture du résultat. Les responsables de formation entrent désormais dans une logique d’investissement dans les compétences. Il nous faut donc développer des indicateurs de suivi pour leur apporter des arguments », déclare Christophe Dupont, vice-président de la FFP Centre-Val de Loire. Le sujet reste complexe. Comment mesurer le retour sur investissement de la formation ? Des pistes existent autour d’un meilleur suivi des stagiaires dans leurs pratiques professionnelles, des certifications professionnelles ou encore des transferts d’activité. Pour Cédric Puydebois, l’évaluation devient stratégique et « sa régulation a besoin d’un tiers. La réforme pose des briques avec la nouvelle certification qualité des organismes de formation et l’exigence de transparence sur les indicateurs ». Innovation digitale, prestations de conseil et d’évaluation, les prestataires de formation devront investir dans de nouvelles compétences et de nouveaux outils. Le marché très atomisé, qui compte entre 60 000 à 80 000 organismes de formation, devra sans doute entrer par une phase de consolidation.
Vidéo / Interview
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